vendredi 19 avril 2024

La Dette : Les dépenses publiques sont-elles trop élevées en France ?

jeudi 15 avril 2021

Non, nous ne consacrons pas 56% de notre PIB aux dépenses publiques

En 2019, les dépenses publiques représentaient 55,6% du PIB, pour autant les dépenses publiques ne sont pas une part du PIB. Cela ne signifie pas que le secteur public « accapare » 56% des richesses nationales et que les dépenses privées s’élèvent à 44% du PIB comme certains le laissent entendre. Pour preuve, l’ensemble des dépenses privées représentent plus de 200% du PIB !

Sur ce point les dépenses publiques sont assez stables puisqu’elles représentaient 52% en 1986.

On ne compte plus le nombre de fois où on a entendu que la France avait trop de fonctionnaires, des administrations trop lourdes et inefficaces et qu’il faudrait donc supprimer des dizaines voire centaines de milliers de postes de fonctionnaires pour retrouver l’équilibre budgétaire. Ainsi, tout cela expliquerait des dépenses publiques trop importantes et in fine, la dette publique. Une fois encore, ces poncifs ne résistent pas à l’analyse.

Il n’y aucun lien entre en la dette publique et le nombre de fonctionnaires

Comme le montre ce graphique, contrairement à une autre idée reçue, la France est loin d’être le pays qui compte le plus de fonctionnaires par rapport à sa population. Le Danemark en compte plus de 50% de plus que nous et la Norvège près de deux fois plus. Cela n’empêche pas ces pays d’avoir une dette publique respectivement de 33% et 47% de leur PIB en 2019. Si ces situations ne peuvent pas être résumées à cela, ces exemples montrent bien l’absence totale de lien entre le nombre de fonctionnaires et la dette publique.

Quelles sont les principales dépenses publiques ?

En 2019, 20 points de PIB, soit 36% des dépenses publiques étaient consacrées aux prestations sociales (retraites, chômage, allocations familiales,…) autrement dit, elles alimentent la dépense privée puisque ces prestations constituent des revenus privés qui vont directement être dépensés dans l’économie. Dans ce cas-là, la puissance publique assure simplement la collecte et la redistribution des ressources.
Un tiers des dépenses publiques étaient-elles consacrées à la production de services publics collectifs (éducation, santé, justice,…).

Près de 10% des dépenses publiques étaient utilisées pour subventionner les entreprises !

Pour le reste, entre 3% et 4% des dépenses publiques étaient alloués respectivement au remboursement de la dette (les intérêts) et aux dépenses d’investissement, environ 5% étaient consacrés aux missions de défense, police et armée.

Enfin, les dépenses de fonctionnement de l’État, souvent pointées du doigt, représentaient à peine 10% du total des dépenses publiques en 2019 soit l’équivalent de 6% du PIB, la moyenne européenne étant à 5,27% ; il n’y a donc pas de « spécificité française » en la matière.

Dépenses socialisées, un choix de société

Nous venons de décrire succinctement l’ensemble des postes de dépenses pour les administrations publiques. Cette liste démontre bien que cela relève d’un choix de société.

Si on voulait réduire la dépense publique coûte que coûte, on pourrait par exemple décider de privatiser totalement la Santé et la Sécurité sociale comme c’est déjà en partie le cas avec les complémentaires. Mais voyons les conséquences, non exhaustives, d’une telle mesure.

En 2018, les dépenses de la Sécurité Sociale s’élevaient à 158 milliards d’euros, privatiser totalement la Sécu ferait donc sortir ces 158 milliards d’euros des dépenses publiques. Pour autant, si cette mission n’était plus assurée par la Sécurité Sociale, elle devrait l’être par d’autres acteurs.

Certes, les ménages gagneraient quelques euros en payant moins de cotisations sociales. Mais ils en perdraient beaucoup en devant payer des cotisations importantes auprès d’organismes privés comme aujourd’hui avec les complémentaires. On assisterait donc à un creusement des inégalités entre les ménages qui peuvent se payer les meilleures assurances et les autres.

De plus, le privé est-il vraiment plus efficace ? Pas du tout, comme le démontre l’expérience des complémentaires.

Pour ce qui est de la Sécurité Sociale, en 2017, les frais de gestion s’élevaient en moyenne à 3,4%, alors que ces frais étaient de 20,3% pour les organismes complémentaires soit 6 fois plus. Très concrètement, cela signifie que pour 100€ de cotisations le système privé en utilise 17,1€ de plus que la Sécurité sociale pour couvrir ses frais de gestion, c’est autant d’argent qui n’est pas consacré au remboursement des soins.

On pourrait retourner le problème en disant que pour 100€ de remboursement de soins, il faut 103,5€ de cotisations pour la Sécurité sociale et 125,5€ de cotisations pour les organismes complémentaires.

Cela s’explique notamment par les dépenses importantes de marketing et de publicité des organismes complémentaires qui cherchent à attirer les clients.
Cela pourrait également être le cas pour l’éducation par exemple si on privatisait le système scolaire.

En privatisant ce type de services publics on réduit donc les dépenses publiques mais cela implique de fait de fortes dépenses privées supplémentaires, difficile à assumer pour certains ménages et cela renforce donc les inégalités. De plus, globalement, les services publics sont plus efficaces grâce aux économies d’échelle et l’absence de dépenses marketing, publicité,… induites par la concurrence.

Ainsi, en 2018, aux Etats-Unis les dépenses de santé représentaient 16,9% du PIB contre 11,2% pour la France. Cette différence n’est pas due à une plus grande attention portée à la santé outre-Atlantique, c’est simplement une des preuves qu’un système grandement privatisé n’induit pas une baisse des dépenses du fait, notamment, de soins biens plus chers.

Les dépenses publiques, stabilisateurs automatiques en temps de crise

Une partie des dépenses publiques, notamment les dépenses sociales, agissent comme des stabilisateurs automatiques, c’est-à-dire qu’elles évoluent dans le sens contraire de l’activité économique et permettent donc de la réguler. Les dépenses d’allocations chômage en sont l’exemple parfait, lorsque l’activité ralentit et donc qu’il y a davantage de chômage, les dépenses de l’assurance chômage augmentent mécaniquement. A l’inverse, en période de plein emploi, les dépenses d’assurance chômage sont réduites au strict minimum.

De plus, en période de crise, l’État doit dépenser massivement pour tenter de relancer l’économie. En effet, les perspectives étant négatives, l’investissement privé est très mince en période de crise, l’État doit donc s’y substituer pour enrayer le cercle vicieux de la récession.

Les dépenses publiques servent donc également à réguler l’économie















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